On a tous besoin du C.H.R !

Le 2 juin 2020 : la date à laquelle les cafés, les bistrots, les bars, les restaurants sont autorisés à ré-ouvrir après plus de deux mois de fermeture focée, pour cause de confinement. En un peu plus de deux mois de fermeture, qu’est-ce qui a changé ? Comment les établissements se sont-ils adaptés ? Comment peut-on imaginer demain pour les Cafés, Hôtels et Restaurants (le CHR) en France ?

horeca

Une première donnée intéressante à analyser, ce sont les chiffres qui confirment que les Français ont voulu fêter la fin du confinement. D’après les données du panéliste Nielsen, le samedi 9 mai, soit deux jours avant le retour à la vie « normale », le rayon alcools a réalisé sa meilleure journée depuis deux mois et certaines catégories, en très net recul durant le confinement, ont retrouvé des couleurs, en particulier le champagne, produit festif par excellence, avec un bond de +74 % par rapport à la moyenne des samedis de la période de confinement.

Toujours selon les données Nielsen, les ventes de boissons alcoolisées ont bondi de +23 % sur la première semaine marquée par la levée des restrictions (du 11 au 17 mai 2020 versus 2019). C’est d’autant plus intéressant qu’en France, contrairement à ce qu’il s’est passé dans d’autres pays, le confinement et la fermeture des bars, pubs et restaurants n’a pas été compensée par les ventes en grandes surfaces : elles sont restées plutôt moroses avec un repli de – 4% dans l’ensemble. A l’inverse, et toujours selon Nielsen, aux Etats-Unis, les ventes en magasin ont augmenté de plus de 26% entre mi-mars et mi-mai par rapport à la même période l’an dernier.

Dans le détail, cette tendance à la hausse touche toutes les catégories des spiritueux, qu’elles aient été en difficulté ou plus dynamiques pendant le confinement, avec une mention spéciale pour le gin et le rhum qui affichent respectivement une progression de +68 % et de +31 %. Les champagnes font +5 % et les vins effervescents + 3%, ce qui est une bonne nouvelle pour ces produits qui ont particulièrement souffert. Et les consommateurs sont également retournés aux rayons vins : +12 % pour les rouges et +23 % les blancs.

Terrasse de café

La fermeture des établissements a eu un impact logique sur les ventes de vins et de spiritueux, mais elle n’en est pas la seule raison. L’interdiction des rassemblements et autres événements -depuis les festivals et les événements sportifs, où l’on consomme de l’alcool, jusqu’aux événements privés, les mariages par exemple, a mécaniquement impacté les ventes d’alcool. Brasseurs de France annonçait il y a quelques jours que 10 millions de litres de bière pourraient être détruits en France car non consommés à temps en raison du confinement. Et tous les pays sont concernés : l’annulation de l’Oktoberfest à Munich à l’automne en est un symbole fort. Autre impact du confinement sur les ventes d’alcool : la fermeture des frontières et la quasi mise à l’arrêt de l’aérien dans le monde : c’est tout le travel retail, depuis la consommation dans les avions et les bateaux jusqu’aux ventes en duty free, qui a été touché.

Comme dans d’autres secteurs, on a vu naître de nombreuses initiatives de la part des acteurs du CHR : des tutos ou des instalives organisés par des bartenders pour apprendre à faire des cocktails à la maison, la vente à emporter de cocktails, mise en oeuvre par de nombreux bars à cocktails, des cartes interactives pour savoir où se procurer de la bière artisanale (parisbeerclub), ou encore une hotline consacrée à la réalisation de cocktails maison -on peut citer l’exemple du « numéro verre » mis en place par Bacardi, proposant l’aide de professionnels de la mixologie pour réaliser des cocktails à partir d’ingrédients que l’on a chez soi.

Il est bien évident que la reprise va prendre du temps : le tourisme va mettre plusieurs mois à revenir à ses niveaux d’avant la crise, et la réouverture annoncée des bars, cafés et restaurants se fait dans des conditions limitantes : même en augmentant la taille d’une terrasse -et encore faut-il avoir une terrasse-, si on ne peut accueillir que la moitié de sa clientèle habituelle, mécaniquement le chiffre d’affaire sera diminué d’autant. Mais on peut aussi imaginer que la reprise des déplacements, la réouverture des lieux de consommation, même en situation adaptée, va permettre de retrouver cette convivialité qui nous a tant manqué, qui fait partie de l’ADN du monde des vins et des spiritueux, et dont les Français vont vouloir profiter. Il sera intéressant aussi d’observer, dans les semaines et les mois à venir, l’impact et les effets que vous avoir toutes les initiatives nées pendant le confinement, comme J’aime mon Bistrot par exemple : vont-elles faire naître une nouvelle forme de relation entre les consommateurs et les patrons de leur bar et de leur café préféré ? A suivre…

Article tiré du podcast SOWINE Talks « On a tous besoin du C.H.R » par Marie Mascré